Récifal :Comment produire vous-même de la microfaune ?

  • Le 11/04/2020

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Récifal : Comment produire vous-même de la microfaune ?

   Beaucoup de récifalistes rêvent d'un refuge qui leur assurerait une production de petits détritivores (  macrofaune et microfaune ) faisant office d'usine bio-chimique perpétuelle et celle de garde-manger "vivant" inépuisable ; autrement dit un refuge dont le taux de reproduction serait égal ou dépasserait le taux de prédation du bac principal. Depuis quasiment le début de la pratique récifale on voit régulièrement des professionnels et des amateurs chevronnés proposer de nouveaux types de refuge "révolutionnaires" susceptibles de maintenir et de produire une population de macro et microfaune quantitativement et qualitativement extraordinaire. Cela fait bien entendu rêver les récifalistes et tourner le commerce mais dans les faits cela ne fonctionne jamais ou jamais bien longtemps ! Pourquoi donc ?  

Le but idéalisé du refuge en récifal : Une production intensive

   Pour bien comprendre la problématique du refuge à macro et microfaune il faut rappeler que la très grande majorité de la "macro-microfaune" adopte un mode de reproduction sexuée qui implique une phase zooplanctonique ; c'est à dire que les gamètes vont se rencontrer en pleine eau, former des oeufs puis des larves flottant elles aussi en pleine eau. Il faut donc comprendre que le refuge peut isoler de la "macrofaune-microfaune" adulte du bac principal mais il ne peut pas empêcher les gamètes, oeufs et larves de circuler dans tout le système et donc d'éviter la voracité des prédateurs ( poissons et coraux notamment ) ! On pourrait penser qu'il suffit d'installer un micron-bag entre le refuge et le bac principal pour palier ce problème. D'abord cela empêcherait bien entendu aussi la micro-macrofaune de passer mais surtout cela ferait tout simplement échouer la reproduction. La phase de zooplancton temporaire ( libération des éléments en pleine eau ) est une nécessité biologique ! Ce qui va faire qu'un refuge va tout de même être un minimum productif c'est que les larves sont rapidement "projetées" contre des supports qui les abritent ( pierres, sables, algues, etc ). Le pourcentage de larves survivantes est suffisant pour assurer un certain temps la survie de la macro et microfaune, mais ce taux de survie sera à peine plus élevé dans le bac principal que dans le refuge ! D'où la déception de ceux qui croient un peu trop aux capacités de réserve à micro-macrofaune d'un refuge. Seule une production intensive pourrait palier le principe : 

" taux de prédation > taux de reproduction = diminution quantitative de la population de proies.  

Le problème des refuges en récifal n'est pas d'ordre physique

   On peut voir régulièrement de nouveaux  tutoriels proposant la construction de boîtes "magiques" à microfaune et de refuges soi-disant spécialement conçus pour que la macro-microfaune s'épanouisse extraordinairement. Toutes ces inventions présentées comme révolutionnaires se résument finalement toujours à de simples modifications physiques : forme géométrique du contenant, hydrodynamisme ( sens du courant, type de pompes, débit, puissance ), éclairage ( intensité, durée, couleur ), substantialité des substrats. Mais on a pu largement constater, depuis tant d'années d'inventivité pseudo-révolutionnaire, que cela ne change rien au problème : La production de macro-microfaune reste toujours limitée quasiment au même point ; c'est-à-dire loin d'être intensive comme elle le devrait pour palier à une densité de prédateur incroyablement plus élevé dans l'espace ou le volume très limité de l'aquarium ! Le facteur limitant des refuges à macro-microfaune n'est pas d'ordre physique. Pas besoin d'aborder ici le facteur chimique puisque les paramètres idéaux d'un refuge sont sur ce point les mêmes que ceux de l'aquarium principal.  

Les "booster" de micro-macrofaune ne résolvent rien 

   En distribuant intentionnellement à la micro-macrofaune de la nourriture spécifique en plus de celle que la matière organique détritique lui apporte naturellement on doit "éco-logiquement" faire augmenter quantitativement la population ?  C'est vrai et c'est le principal argument des fabricants et distributeurs de "booster à microfaune". Cela dit en passant, pas besoin de nourriture sèche "spéciale" en boîtes ou flacons pour booster la microfaune, n'importe quelle source de nourriture saine pour l'aquarium ( paillettes, granulés, spiruline en poudre ou mieux encore phytoplancton vivant ) fera l'affaire ! Donc en "boostant" la macro-microfaune on devrait avoir un refuge encore plus riche quantitativement en micro-détritivores. Oui, il y aura probablement plus de macro-microfaune... mais assurément le refuge ne sera en aucun cas le lieu de production intensive que nous espérons ! Pour obtenir une production intensive, ce que je fais par exemple dans mes bacs d'élevage, il faut impérativement reconstituer des conditions qui ne sont plus tout à fait celle d'un récifal ! Dans la nature, c'est dans les zones les plus chargés en nutriments que la macro-microfaune se développe en très grande quantité. Dans les lagons, c'est sur certaines parties de l'estran, là où se décomposent de grosses quantité de matière organique et bien souvent arrivent des alluvions terrestres ( sédiments ) que se trouvent la plus grande partie des micro-détritivores qui assurent à "courte" distance l'épuration du milieu corallien proprement dit. Une partie des récifs est "nettoyé" par dilution vers les zones pélagiques ( haute mer ), l'autre est déposé sur l'estran par le marnage ( balancement des marées ). Le lieu de vie préférentiel des micro-détritivores que nous apprécions dans nos bacs n'est certes pas une zone de pollution au sens environnemental du terme mais les paramètres chimiques qui y règnent ( no3, po4 notamment ) ne conviendraient pas sur la durée à des coraux et à fortiori des coraux durs ! Nous commençons à entrevoir le coeur de notre problématique ! Un refuge est un bac annexé au bac principal. Or, on ne peut "booster" la micro-macrofaune sans tenir compte de l'évolution des taux de no3 et po4 dans le bac tout entier ! 

Dissocier le refuge du bac récifal principal est la seule solution

   Il est impossible vous l'aurez compris de reconstituer les conditions idéales d'un élevage intensif de macro-microfaune dans un bac annexé au bac principal. Pour y parvenir il faut impérativement créer un aquarium d'eau de mer spécifique. Il faut aussi, et ce n'est pas la moindre des difficultés, que ce bac soit écosystémique, autrement dit un aquarium relativement autonome capable de s'auto-épurer sans extraction mécanique ( écumeur, filtre ), même partielle. Dans ce genre de biotope spécial " production intensive de microfaune" chaque "parcelle" de matière organique détritiques doit profiter à la biomasse. De même, les changements d'eau massifs ( disons de plus de 5 % ) doivent être très rares, voir inexistants; afin de ne pas affaiblir brutalement la biomasse flottante ; ce qui entraînerait quasi immédiatement une rupture d'équilibre de la chaîne trophique et détritique. Le bac doit être très fortement éclairé pour favoriser le développement de micro-organismes végétaux constituant partiellement le régime alimentaire de certaines espèces. Il va s'en dire qu'un lit de sable de forte épaisseur ( 20 cm minimum ) est strictement indispensable dans un tel bac naturel. Le bac doit être le plus grand possible afin de permettre à la micro-biodiversité de créer de nombreuses niches écologiques. Avec un tel bac, loin de l'idée idéalisée qu'on se fait d'un refuge, vous pouvez espérer obtenir une reproduction intensive de macro-microfaune. Bien entendu je ne parle pas d'obtenir une production intensive comme la mienne ( intensifiée à son paroxysme écologique ( c'est un métier ! ) ) mais suffisante pour vous assurer une véritable réserve durable de micro-macrofaune pour vous et un ou deux amis.